"C'est
fluctuat nec mergitur, c'était pas d' la littérature
"
Georges Brassens
Ier épisode :
Ils ne s'entendent
pas très bien
IIè
épisode
: Faut pas rêver!
IIIè
épisode
: Les introuvables
IVè
épisode
: L'amour c'est...
Vè
épisode
: Ôte-moi d'un doute
VIè
épisode
: Ê.M.N.I., l'ami qui vous...
VIIè
épisode
: Un seul être vous manque, et tout est connecté
Ier épisode
: Ils ne s'entendent pas très bien
Il
existe des êtres humains qui dorment lorsque d'autres sont
éveillés. Ils sont les gardiens de notre planète,
ils se transmettent des messages, maintenant par l'Internet,
cela se nomme des e.mails. Ils prennent contact entre eux au
gré du hasard fabriqué de mots et de maux, de désirs
aussi, mais ils ignorent lesquels. Ces désirs les dirigent
à l'insu de leur plein gré... paraît-il.
Ils y dessinent des visages d'hommes ou de femmes, c'est selon.
Ce sont les prisonniers, les esclaves, les assujettis... les êtres
dits: humains. On en croise partout d'un bout de la planète
à l'autre. Ils s'assemblent par ressemblances pour ne
pas se sentir trop isolés, pour parler un peu, puisque
c'est le propre de l'Homme. Alors ils disent qu'ils communiquent,
qu'ils échangent des points de vues, des sensations, des
sentiments... Et ils le disent à leurs enfants et à
leurs semblables... Mais ils ne s'entendent pas très bien!
Il est dit qu'existent
aussi des espèces plus rares, en voie de disparition.
Il paraît qu'ils ressemblent à des êtres non
réellement identifiés encore. Ce sont les ÊMNI,
pas les ennemis. Ils sont effrayants. Ils ont souvent des prénoms
ou des noms étranges. Ils disent de drôles de trucs,
sous forme de poèmes parfois, ou de contes. Il paraît
qu'ils sont fous. On ne les voit que dans les rêves, et
les "éveillés" disent que ce ne sont
que des histoires que les hommes se racontent pour continuer
à vivre, pour que la terre continue de tourner aussi rond
que possible. Mais il y a les guerres, les catastrophes naturelles,
les morts subites, les maladies....alors on y comprend plus rien. Et c'est tant mieux.
Les plus éveillés,
ceux qui ont souvent du mal à dormir décident parfois
d'aller vraiment en parler à quelqu'un, à des thérapeutes
du psychisme, dans le meilleur des cas. Il est dit que les ÊMNI
sont aussi des thérapeutes très très doués
et que c'est une des raisons pour laquelle ils survivent encore
à ce jour. Certains humains les ont aperçus derrière
leurs divans
Ils fantasmaient peut-être.
Allez savoir
.
IIème épisode
: Faut pas rêver!
Aujourd'hui encore, il y a des êtres, dits humains,
qui ne rêvent pas. Surtout la nuit. Ils sont trop épuisés
par leurs activités. Souvent, pour ne surtout pas rêver
ils avalent des cachets, pour le stress. C'est écrit partout.
Ils le savent bien. Ils disent qu'il faut toujours aller de l'avant.
Et vite. Et beaucoup... Ils sont informés de tout et de
riens. Plus de doute, mais c'est bien
sûr! Lorsqu'ils rêvent c'est éveillé,
mais ils ne le savent pas. Quand ils sont déçus
ils tournent la page
Mais de quel livre ?
Leur Rêve c'est
d'être conformes, même si c'est un mot qui commence
très mal (dixit un ÊMNI je crois). Et quand ils
se mettent à prendre leur désir pour une réalité
ils sont remis vite fait au pas. Ils sont licenciés, mais
pas comme dans les Fac
Et s'ils insistent il y a des lois,
et sans failles. Lorsqu'ils sont enfin bien sous tous rapports
et qu'ils ont l'air comme il faut et comme tout le monde, mais
en beaucoup mieux encore, ils se mettent alors à parler
haut, et très fort. Cela réveille les endormis
qui font mine de refuser de comprendre que le monde appartient
à ceux qui se lèvent tôt. Bon pied bon il
! Ils ont des rendez-vous sur rendez-vous. Ils disent qu'ils
sont charrette et qu'ils sont surbookés.
Se sont sûrement des mots codés. A la guerre comme
à la guerre. Ils n'ont pas l' temps. Et pourtant
.
Les plus éveillés
se reconnaissent entre eux, surtout par leurs diplômes.
Ils ont souvent beaucoup de mal à redescendre des Grandes Écoles des très Hautes Études. On les trouve dans les
milieux autorisés. Ils font beaucoup de discours
et savent ce qu'ils disent. D'ailleurs c'est prouvé, référencé
et labellisé, par d'autres milieux encore plus autorisés.
Quelquefois,
ils sont bien obligés de se reposer un peu, et des rêves
traversent alors leurs nuits. Des rêves comme ceux dont
parlait Freud. Ils l'ont lu. Des rêves qui sont de vrais
cauchemars parfois. Ils se mettent alors à se réveiller
tout en dormant. Ils veulent bien en parler mais à
de vrais professionnels, certifiés, comme eux,
car ils ne sont pas dupes. D'ailleurs ils savent, tout
comme Lacan qu'il n'y a pas de rapport sexuel 1, ni même de grand Autre indéboulonnable 2, et que signifié et signifiant ce n'est
pas la même chose du tout. Et puisque Lacan a relut Freud
-et dans le texte de surcroît!- plus de crainte
à avoir.
IIIème épisode
: Les introuvables

Un jour, vers la fin du XIX ème siècle, juste avant
La
troisième mort de Dieu 3,
on put enfin lire de nos yeux des témoignages. C'était
comme une grille de lectures, à la façon des talmudistes.
Il s'agissait de lectures de rêves. Et aussi d'hypothèses.
Pas de certitudes. Une vraie bombe explosait qui divisa les humains
en deux parties égales. Puis les divisa encore à
l'intérieur d'eux-mêmes. En plus...! On comprenait
de moins en moins, C'était comme une Inquiétante
étrangeté 4 tout
en étant familière à la fois. Il s'agissait
de rêves où des ÊMNI apparaissaient masqués,
comme au bal de Rien qu'un rêve, d'Arthur Schnitzler.
Ces textes ne parlaient que de désirs enfouis aux fins
fonds des temps les plus archaïques, et du temps présent
aussi, et aussi de ce qui pourrait advenir. Tout ça
conjugué et concomitant, qui plus est.
D'autres témoignages,
diffusés par des internautes sachant-surfer, évoquaient
des histoires de survie suite à des maltraitances. Ils
laissaient entendre qu'ils avaient survécu sûrement
grâce à des ÊMNI, mais ne l'exprimaient qu'en
demi teinte. Alors c'était pas clair
.Ces internautes
étaient peut-être des-êtres dont l'identité
avait volé en éclats, comme sous l'effet d'une
bombe atomique. Sandor
Ferenczi en parlait
déjà il y a plus d'un siècle. Ou bien étaient-ce
des Zélig à la sauce Woody Allen? Ceux-là
ne demandaient pourtant qu'à en parler, mais à
qui? Souvent trop aveuglés par ce qui brille le plus,
comme aux temps du Veau d'Or, harponnés tels des proies
par Le discours sur Le Savoir plutôt que par un savoir
sur les discours, ces déshérités de leur
histoire furent probablement noyés dans leur image dès
leur naissance. Comme Narcisse.
Alors ils sont tombés sur des becs... Dans l'eau?
IVème épisode
: L'amour c'est donner ce qu'on a pas à quelqu'un qui
n'en veut pas

Un jour il y eut un homme et une femme et c'est eux qui furent
chargés de fonder le genre humain, dit-on. Le coupable
de la rencontre fut nommé : serpent. Peut-être parce
qu'il était nu comme un ver ? Ce fut comme la naissance
de ce que nous pensons être l'Amour... Celui qui fait courir
les hommes et les femmes, mais pas toujours l'un vers l'autre,
loin s'en faut. Les plus éveillés ont fait couler
beaucoup d'encre à ce propos. Ils sont avertis. Ils ont
lu, vu et vécu. Alors ils ne s'y laissent plus prendre,
même s'ils font des enfants, puisqu'ils sont à leur
image. Tout sages. Ils ne sont pas fous. Pourtant l'envie, la
jalousie, la haine de l'autre et de soi
Cela va de soi.
Les blessures à jamais sanguinolentes et contaminantes
comme les MST
qu'ils font mine de panser (avec je de mot).
L'amour c'est donner ce qu'on a pas à quelqu'un qui
n'en veut pas
comme disait l'Autre.
Les
virus étaient à l'ordre du jour. I love you,
sussurait celui-ci, via le Web. La mémoire du futur était
bel et bien menacée, mais le bon Docteur Norton veillait
lui aussi à ne rien laisser passer, il faut croire! Le
même jour exactement on parlait d'un spectaculaire retournement
de situation concernant un autre virus, celui du SIDA. Un nouveau
vaccin composé de ce virus allait être expérimenté,
contre le SIDA lui-même, et contre des maladies génétiques
encore inguérissables jusqu'alors. Ainsi va le monde?
Un journal de la gauche
paillettes 5, avait aussi identifié
I love you, en petite culotte et soutien gorge, l'air
bien méchant(e). A l'image, peut-être, de celle
qui a mangé la pomme, ou de nos nouvelles dirigeantes?
Ou bien était-ce cette stupéfiante Lilith? Les
hommes eux, disent-ils encore je t'aime? ... Même pas
en anglais. Peut-être en rêve?
Les humains déploient
une volonté folle, à banaliser l'Histoire et les
histoires, absolument. Ils le savent bien: il faut vivre
avec et il faut de tout pour faire un monde. Les hommes
et les femmes ne sont-ils pas supposés être
égaux?
Vème épisode
: Ôte-moi d'un doute

Quelques endormis, abusés
par le décalage du temps, se sont enfin réveillés
après en avoir parlé à des éveillés-psy.
Alors, une fois bien théorisés et terrorisés,
ils "s'autorisent d'eux-mêmes" et sans
les quelques autres 6, pourtant indispensables (comme le préconisait
pourtant le docteur Lacan) à s'installer. Mais
dans quoi? Ils se mettent alors à recevoir, des endormis encore,
qu'ils tentent de réveiller à coup de scansions
toutes les dix minutes, pour laisser la place aux suivants.
Ces éveillés interviennent un peu partout,
publient textes sur textes, et plus souvent qu'à leurs
tours. Alors on les consulte dans les médias pour un oui ou pour
un non. Ils se critiquent aussi beaucoup entre eux -surtout
lorsqu'ils produisent- mais seulement dans les couloirs
et en catimini. Il y a l' éthique, après
tout.
Une
fois bel et bien contrôlés, certifiés
tout à fait adéquats, ou mieux, ayant "traversé
leur fantasme" 7,
tout doute leur étant définitivement ôté,
ils s'autorisent plus que jamais à cultiver le
plus longtemps et le plus silencieusement possible les plaintes
de leurs (im)patients. Entre deux, ils distillent au goutte à
goutte, le fruit de la quintessence de leurs certitudes et ce,
doublé de surinterprétations en veux-tu en voilà
Ainsi la boucle est bouclée de même que tout désir
de désaliénation auquel tout un chacun est en droit
de s'attendre d'une telle démarche.
Alors, ceux qui y survivent circulent de divans en face-à-face
et de tranches en tranches pour tenter de s'y reconnaître,
dans ces miroirs... sans teint?
Mon cur sous un rouleau compresseur! 8 hurlait pourtant un ÊMNI,
je crois, bien avant la tempête décapitante et la
Marée noire bretonne. A force de "ne pas céder sur son désir"
9, l'éveillé s'endort sous ses lauriers,
sans doute.
VIème épisode
: ÊMNI, l'ami qui vous veut du bien?
Il
paraît que les ÊMNI, eux, ne nous veulent pas
que du bien,
car ils nous font réfléchir. Comme les miroirs
?
Il est dit que les ÊMNI peuvent modifier ce que certains
nomment encore le destin. On peut leur parler comme à
l'ami que l'on a toujours souhaité rencontrer sans même
avoir osé en rêver. Ils peuvent prendre parfois
les traits de ceux qui nous ont été les plus chers
ou les plus haïs. Mais pas vraiment, car ils ne s'y croient
pas
Alors les schémas de pensées qui nous
enfermaient à double tours se dissipent. Comme de mauvais
élèves?
Ceux qui ont vu des ÊMNI
racontent qu'ils voyagent, même sur place, et que souvent
ils reviennent de loin. Mais d'où?
On peux les rencontrer,
dit-on, surtout dans les moments où l'on s'y attend le
moins et que, parfois, nous les croisons sans les reconnaître,
sauf si l'on regarde dans les yeux. Ils paraît qu'ils ne
parlent pas mais nous parlent et que ce n'est pas la même
chose. Ils n'écoutent pas non plus mais ils entendent
au travers de nos bavardages, de nos silences et même de
nos boutades. C'est alors que quelque chose nous touche,
comme dans une uvre d'art, et là où s'était
le plus verrouillé en nous, le plus enfoui, et
depuis très longtemps. C'est à ce moment là
où l'on sait qu'on en a rencontré.
L'autre jour un documentaire
présentait un anthropologue géographe dans une
zone escarpée et impraticable, quelque part vers la Chine
du sud, je crois. Quelques habitants de ces régions disaient
qu'ils avaient aperçu certaines nuits des êtres
bizarres. Et le plus étrange était que les descriptions
de chacun concordaient ensemble, mêmes s'il vivaient extrêmement
éloignés les uns des autres, sans moyens de communication
ni routes. C'étaient peut-être bien des ÊMNI.
Quoique...
On parle aussi d'ÊMNI
dans certains livres, mais épuisés eux aussi.
Ils sont aussi quelquefois cités dans des textes qui circulent
sous le manteau, l'hiver. On peut y lire des récits qui
laissent entendre qu'à la croisée des chemins,
au crépuscule -là où les traits d'un ami
peuvent se confondrent avec ceux d'un ennemi- les cauchemars
peuvent aussi devenir de véritables rêves.
Au fil des Temps.
VIIème épisode : Un seul être
vous manque, et tout est connecté
Les éveillés
étaient reliés entre eux, 35 heures sur 24 par
les télécommunications, ils sont maintenant connectés
Plus "un pas sans Bata". Les e. books et les mobiles
(du crime ?) ont largement comblé tout ce qui pourrait
ressembler de près ou de loin à toute absence.
Seul le double-appel téléphonique tient encore
lieu et place de silence ou de pause. On connaît la musique
Le "For-Da" 10
nest vraiment plus quune inscription dun autre
temps. Quoique avec sa drôle de bobine de fil
on peut se demander.
Il y
avait les souvenirs-écrans11, il y a les écrans kinopanoramiques des
plus folles attentes hallucinées. Ils lavaient rêvé,
ils sont exaucés
Lattention est au colmatage
de brèches à tout prix, les espaces et les lieux
se confondent en excuses. Les plannings sont bouclés à
double tours ainsi que tout espace et espèce de rêveries
rebelles. Le zapping et le clic sont les chefs des pulsions orchestrées.
Il y avait Saint-Saëns et la Mort du cygne, mais de quel
signe?
et que reste-t-il de nos cinq sens? Le regard,
tout comme l'affect sont consignés au rang des
objets dits petit tas ... C'est le bouquet, même
renversé! Touchés peut-être, mais seulement à
la Bataille navale...
Le virtuel ne serait-il
que là-venir dune illusion12 de
plus? Les Totems et les Tabous de Freud ny reconnaîtraient
plus leurs petits
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