Un roman russe

Emmanuel Carrère

POL mars 2007

 

 

 

Revue de presse

Dans «Un roman russe», à paraître le 1er mars chez POL, l'écrivain, fils d'Hélène Carrère d'Encausse, révèle que son grand-père a été tué pour avoir collaboré avec les Allemands... C'est son premier livre autobiographique. Un texte d'une force incroyable... Jusqu'à maintenant, Hélène Carrère d'Encausse, la fille de Georges et la mère d'Emmanuel, avait gardé pour elle ce lourd secret. Que son fils le lève dans un livre lui est insupportable. Mais rien, ni ses cuites nombreuses ni ses séances chez le psy, n'arrêtera l'écrivain dans sa quête obstinée de la vérité, qui tourne vite au jeu de massacre... «J'ai reçu en héritage l'horreur, la folie et l'interdiction de les dire. Mais je les ai dites. C'est une victoire.» Et c'est désormais un livre dostoïevskien, rouge et noir.
Jérôme Garcin - L'Express du 22 février 2007

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Chacun des ouvrages, fictions pures ou récits, qui composent la bibliographie anxieuse et remarquable d'Emmanuel Carrère est comme un coup de sonde dans l'abîme. Une leçon de ténèbres, une incursion volontaire et entêtée dans l'opacité, l'obscurité sans contours ni fin où tâtonne et se débat l'intelligence, confrontée à l'illusion et à l'incertitude, à une vérité sur les êtres et sur le monde qui toujours se dérobe, se délite, se refuse... Un roman russe est la nouvelle déclinaison, admirable, intimiste et émouvante, de ce questionnement obsédant. Emouvante car l'écrivain recherche et accepte ici un dévoilement, une mise en danger de lui-même inédite à ce jour. Cette vulnérabilité donne véritablement à son récit valeur de confession, au sens non pas religieux mais littéraire du terme - l'écriture, la représentation et la mise en ordre qu'elle suppose sont investies d'un pouvoir de catharsis, de purification, de «délivrance», écrit Emmanuel Carrère.
Nathalie Crom - Télérama du 28 février 2008

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Un roman russe est une autobiographie. Que fait-elle, sinon raconter des histoires ? Elles se chevauchent, s'éclairent, n'en font plus qu'une, tant et si bien que le livre devient une autoanalyse à ciel ouvert. C'est d'abord l'histoire d'un écrivain condamné aux morts, et qui veut s'échapper... Il y a une quantité de registres éblouissante dans Un roman russe, une diversité à laquelle Emmanuel Carrère n'a pas eu recours dans ses précédents livres. Il y a des passages burlesques dans la maison de vacances familiale, avant que l'émotion prenne le dessus... La psychanalyse et la littérature lui ont enseigné que les fantômes s'incrustent dans les familles pour les hanter sur plusieurs générations, et que les tabous, s'ils ne sont pas levés, empoisonnent. Un roman russe relie explicitement chaque obsession, et chaque ouvrage d'Emmanuel Carrère à l'aura de malheur qui entoure le grand-père.
Claire Devarrieux - Libération du 1er mars 2007

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Pour bien donner le ton, il commence par une transgression. Sa mère, Mme la secrétaire perpétuelle de l'Académie française, lui avait expressément interdit de révéler un lourd secret de famille. Il passe outre. Le 10 septembre 1944, son grand-père maternel, Georges Zourabichvili, qui n'avait pas choisi le bon camp, est arrêté à Bordeaux par des hommes armés de mitraillettes qui l'embarquent dans une traction avant... Emmanuel Carrère va poursuivre le fantôme de ses ancêtres russes jusqu'à Kotelnitch, un grand village à 800 kilomètres au nord-est de Moscou. Palissades de bois, faces de hooligans et bouleaux à perte de vue : Emmanuel Carrère décrit à merveille la déglingue postsoviétique... Toutes ces poupées russes finissent-elles par s'emboîter et former une histoire ? Culpabilité, haine de soi, dépression, Un roman russe est un formidable exorcisme jeté sur la page. Il a le charme vrai de ces livres excessifs et imparfaits, humains, trop humains.
Jérôme Dupuis - L'Express du 1er mars 2007

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Un roman russe... c'est plutôt un roman français. «Un récit autobiographique», corrige immédiatement son auteur, le trop rare Emmanuel Carrère, avant de concéder : «Remarquez, mon livre est construit de façon romanesque. Mais tout est vrai, à l'exception de quelques broutilles.» Quant à la Russie, c'est moins une question d'hommage à Dostoïevski que de quête des origines. Rappelons-le : l'auteur de La classe de neige n'est autre que le fils d'Hélène Carrère d'Encausse, secrétaire perpétuel de l'Académie française, ex- parlementaire européenne et spécialiste de la Russie - elle est fille d'immigrés -, qui fit scandale avec des propos malencontreux sur la crise des banlieues et la polygamie à la télévision moscovite. C'est à elle qu'Emmanuel Carrère dédie les huit dernières pages d'Un roman russe, dans une lettre affectueuse et violente, conclusion de ce livre-patchwork où l'écrivain livre sans fard quelques éléments de sa vie a priori disparates. Et pourtant... C'est justement l'une des grandes réussites d'Un roman russe : parvenir à restituer la complexité d'un homme à travers des événements biographiques aussi distants. S'il explore toujours aussi bien l'identité et l'état d'un homme aux frontières de la folie, Carrère ose des scènes érotiques, magnifiques et sans le moindre tabou, placées au même niveau que la quête des origines. Baptiste Liger - Lire, mars 2007

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Le romancier Emmanuel Carrère explore son passé et combat ses démons. Et signe un chef-d'oeuvre. Emmanuel Carrère porte sur son visage les cicatrices de ses guerres intérieures. Celle qu'il mène depuis sept ans et qu'il relate dans le livre qui paraît aujourd'hui ne l'a pas épargné. Et pourtant, c'est un homme pacifié qui attend la publication d'Un roman russe, récit strictement autobiographique mais follement romanesque, rédigé à la première personne, où l'écriture et l'existence marchent de concert...L'auteur est immergé dans l'instant, ignorant du lendemain et du sens qu'aura finalement son texte, tout en étant conscient des forces à l'oeuvre et averti de l'issue de l'histoire. Cela donne une sorte de «work in progress» abouti. Saisissant... Un roman russe est un livre à coeur ouvert, déchirant parce qu'il met en pièces les faux-semblants de l'ego. L'auteur effeuille jusqu'à leur racine ses propres gestes en les éclairant d'un jour souvent cruel pour son amour-propre. S'il y a un jour un Jugement dernier, nul doute que le poids de vérité contenu dans cet examen de conscience pèsera en sa faveur... Astrid de Larminat - Le Figaro du 1er mars 2007